Famille n.f. " Institution juridique qui groupe des personnes unies par les liens du mariage, par les liens du sang, éventuellement, en vertu d'un pacte, par des liens d'adoption. "
Il est dit que les liens du sang sont les plus indéfectibles mais cela te fait doucement rire. Difficile de croire en la magie de la famille lorsque ta mère t'a donné vie suite à un viol, un fait presque banal dans cette ville défavorisée au fin fond du Guatemala, où tu as passé toute ton enfance. Et dire que tu as hérité ta beauté d'un acte aussi ignoble, c'est presque immonde mais c'est ainsi. On aurait très bien pu te cacher l'histoire sordide de ta conception mais à quoi bon alors que tu as pleinement conscience de ces actes barbares depuis ton plus jeune âge. Il n'est pas forcément aisé de s'épanouir parmi la violence, la drogue, les meurtres et tout ce qui va avec. Heureusement pour toi que tes frères et soeurs ainés t'ont pris sous leurs ailes. Tu en as d'ailleurs fait de même lorsque ta famille s'est agrandie. La solidarité; voilà ce qui définit les Murillo depuis des générations. Pas vraiment le choix quand les revenus sont limités. Il faut savoir faire preuve d'ingéniosité pour nourrir tout le monde et évidemment quand tu ne te tuais pas à la tâche dans le restaurant miteux qui te payait trois fois rien, il te fallait t'occuper de la maison (si on pouvait appeler ça ainsi) mais au moins vous aviez un toit au dessus de la tête, presque un confort.

Gang n.m. " Association de malfaiteurs organisés en bande. "
Le Guatemala, un des pays du monde ayant le plus haut taux de violence. La pauvreté y est bien pour quelque chose et les gangs ne cessent de fleurir. Ici on vit avec la peur perpétuelle que de mourir dans la seconde qui suit. Il suffit de se trouver au mauvais endroit, au mauvais moment et c'en est fini de votre existence. L'avenir est incertain mais ça ne t'empêche pas de vivre. Tu passes le plus clair de ton temps dehors, à profiter de la compagnie de tes rares amis. Une bouffée d'air frais plus que nécessaire afin de supporter l'abominable clientèle qui se rue au seing du restaurant où tu trimes jour et nuit. Les touristes sont loin de fréquenter l'établissement où tu bosses, t'as plutôt le droit aux racailles du coin, à ceux qui contrôlent cette partie de la ville et qui ont main mise sur à peu près tout. Ils pensent que tout leur est du y compris ton petit cul. Bon nombre de fois le leader du gang du coin t'a fait des avances. Tu as essayé de l'ignorer mais difficile de dire non lorsqu'on te promet monts et merveilles. La proie facile que tu es, a fini par céder. Une grossière erreur que de se laisser embrigadée dans un monde dangereux. Mais te retrouver du côté sombre te garantissait une espérance de vie un peu plus longue. Chasser ou être chassé, il en est ainsi. On ne dit pas non à un semblant de protection. Pour survivre il faut faire des sacrifices. Il t'a fallu commettre quelques délits pour prouver ta bonne foi et ta loyauté. Et tu te souviendras toujours de ce jour où tu dû ôter la vie à ce jeune homme, entrer sur votre territoire. Son visage te hante encore jour et nuit.


Maternité n.f. " Le fait d'être mère, les droits, devoirs, sentiments et attitudes liés à cette fonction. "
Vingt ans seulement et te voilà enceinte de cet homme qui t'a enrôlé dans ce monde que tu aurais du fuir par tous les moyens. Accueillir un enfant dans cette situation n'est sans doute pas un bon point non plus mais tu ne peux te résoudre à avorter. Ta foi ne te l'autorise pas et ton instinct de mère s'y refuse. Malgré le contexte peu approprié, tu sais que ton enfant sera choyé. Tu en es déjà follement amoureuse et rien n'y personne ne pourra te contraindre à le confier à une famille plus à même de lui offrir un foyer digne de ce nom. Ton homme ne le permettrait pas non plus. A partir de ce moment où tu as su que tu portais la vie en toi, tu n'as cessé de dépenser ton temps et ton argent pour préparer sa venu au monde. Une petite fille t'avait t-on dit. Une fille que tu nommerais Graziella. Son berceau, où s'entassait des milliers de peluches, l'attendait déjà impatiemment dans cette chambre peinte en mauve. Graziella ne vit jamais le jour. Son père ayant eu l'idée de passer ses nerfs sur ton corps quand il t'a vu parler à un inconnu. Un homme qui n'est plus de ce monde non plus. Tu n'as pas eu cette chance que de rencontrer ta fille, de l'élever, de lui offrir tout ton amour mais elle vit dans ton coeur.

Sans-papier n.m. "Personne qui ne possède pas les documents qui lui permettent de justifier de son identité et, si elle est étrangère, de la régularité de sa situation. "
Prendre la fuite, tout effacer et recommencer. Une décision risquée mais tu ne pouvais te résoudre à rester avec cet homme qui t'avait arraché le fruit de tes entrailles. Refuser de croiser à nouveau son regard n'était pas un acte lâche mais une question de survie. Tu n'avais plus vraiment de raison de vivre depuis la perte de Graziella mais tu as peur de la mort, il faut l'avouer. Avec tes maigres économies, tu t'aies acheté un aller simple pour L.A. prétextant un voyage de loisirs auprès de la douane américaine. Et pour dire vrai tu ne savais pas réellement si tu resterais aux Etats-Unis ou si tu vagabonderais ici et là. Ton visa a expiré au bout de six mois tandis que tu avais trouvé une place de gogo danseuse dans un club assez sélect de la ville. Le patron se fichait un peu que tes papiers ne soient pas en règle étant donné que tu étais payé au black. Tes plus fidèles clients te permettaient d'arrondir tes fins de mois. Un job qui ne paye pas de mine mais ça te suffit. Tu t'entends bien avec le reste des filles qui t'ont trouvé une place où dormir dans le loft. Au vu de ta situation irrégulière, tu te fais aussi petite que possible, évitant les forces de l'ordre. Moins les gens en savent sur toi, mieux c'est.

Avenir n.m. " Ce qui doit arriver, le futur. "
Le passé n'est que douleur, le présent est monotone et le futur est flou. Un brouillard épais dans lequel tu te perds. Jamais tu ne trouveras la sortie de ce labyrinthe où tu t'es perdu. Tu n'as aucunes attaches, aucun but. Pourquoi se battre pour quelques chose d’inaccessible qu'est le bonheur ? A quoi bon se fixer des objectifs quand on part de rien ? Ce n'est pas ton passé dans un gang et ton job de gogo danseuse qui vont pouvoir gonfler ton cv. Tu erres donc sur Terre, attendant demain qui sera toujours aussi insipide qu'aujourd'hui. La vie est un cadeau empoisonné rien de plus. Une vaste fumisterie qui n'a pas grande valeur à tes yeux.