t'entends la musique depuis les escaliers. les voisins sont sourds ? ou juste trop poli. ça t'étonne. ça t'étonne aussi que les flics soient déjà pas là. même pas besoin des clés, juste tourner la poignée.
et c'est pire que prévu. ton cerveau prend même pas le temps d'analyser ce qui jonche le sol, le nombre de personne, le bruit venant des chambres quand tu passes à côté des portes. t'essayes juste de te frayer un chemin dans le bordel. en cherchant une seule personne. alice. t'as encore rien lâché, ni ton sac, ni tes chaussures. tu te fonds dans la masse, sans tenter de reconnaître quelqu'un. la musique trop forte te chatouille les tympans.
pas dans la foule, tu vas pas aller vérifier les chambres. reste la salle de bain. ah. enfin. elle est là, mais elle est pas seule. pourquoi t'es pas surpris. tu t’immisces entre les deux. attrape le mec par les épaules, et le repousses dans le salon avec un grand sourire. je te l'emprunte. quitte à ce qu'il pense que t'es son mec, rien à faire. la porte claque. étouffe un peu la musique au passage. tu dois pas être beau à voir, ton sourire habituel a disparu. tu penses même pas être en colère, juste extrêmement déçu et tu sais pas ce qui est le pire.  tu croyais pouvoir contrôler le truc ? ou tu croyais juste que tout le monde s'en irait bien gentiment avant que rose ou moi rentre ? ou t’espérais peut être même qu'on rentre pas, et pouvoir te taper un des mecs dans ton lit. t'essayes de contrôler le ton de ta voix, les paroles, les gestes. et la tension qui monte. mais un rire jaune s'échappe de tes lèvres. puisque de toute manière, les deux autres sont occupés. c'est pas comme si les deux couples entrain de copuler était discret. tu sens tes côtes vibrer à force de rire silencieusement. tes neurones sont pas assez en forme pour réfléchir à une manière simple de tout arranger. je pensais pas que tu pouvais me décevoir à ce point. t'avais pas besoin de ça. pas après la soirée merde. le boss qui a passé ses nerfs contre toi, en se plaignant de tout et de rien. surtout de rien. et de chose que tu pouvais pas régler. alors alice, elle a mal calculé son coup. tu soupires, ouvre la fenêtre. te poses sur le bord de la baignoire et allumes une clope. au point où on en est. les problèmes peuvent bien attendre cinq minutes.

Il embrasse bien, je crois… J’essayerai de juger avec du recul, demain matin, si j’y pense encore… Enfin, bref, il est quand même un peu collant, avec ses mains, là. Sales mains qui montent, qui montent, mais que j’essaye d’abaisser, parce que c’était pas mon envie, là, de… Bon, est-ce que je lui fais comprendre ou je capitule en me laissant faire ? Ca pourrait être bien, qui sait ? De se laisser faire, … Quoique, non. Non, c’est pas moi, ça. Oh, merde… Faudrait que je reprenne le contr…

BAM.(-è!-_

Une tornade l’entraîne avec elle et le jette plus loin. J’ai comme froid, d’un seul coup, aussi froid que le regard de la tornade. Ezekiel, tiens ! Quel plais… Enfin… Oups, j’ai oublié de l’inviter ? Ah mais, c’est vrai que… C’était censé se faire sans lui, ce soir. Je crois que c’est la lueur de déception dans ses yeux, qui me le rappelle soudainement. Rien de bien grave jusque là. Et puis, il y a ses mots. Un peu plus forts. Oh, bon, il n’est pas content, c’est normal, mais de là à en faire tout un fromage ? C’est la joie qui doit régner ce soir ! D’ailleurs, c’est ce que je comptais lui répondre avant qu’il ne me dise à quel point je l’ai déçu. Bon… Ca se passe moins bien que prévu, cette histoire. Enfin, OK, je n’avais rien prévu de tout ça, mais quand même, ça prend un mauvais tournant.

Je me décolle du mur et me rapproche de lui, sentant l’alcool perturber mon équilibre. Tout sourire, je viens m’asseoir à côté de lui sur le rebord de la baignoire et pose mon visage sur son épaule, le regard accroché à ses lèvres, ou plutôt sa clope. “Oh, détends-toi un peu, je te sens tendu.” Pour ça... Pour tant de gaïté et de rires ! J’ai du mal à décoller mes yeux du bâton incandescent, presque fascinant tout à coup. ”Merci de m’avoir débarrassée de ce gars, je ne savais plus trop quoi en faire.” Ajouté-je dans un murmure un peu amusé, avant de poursuivre sur un ton plus malicieux : “J’le savais que tu avais un petit côté jaloux au fond de toi, mais t’en fais pas, t’es bien plus beau que lui.” L’alcool… Je sais, c’est pas toujours une aide.

Les yeux rivés sur lui, j’en oublie un peu la fête pendant un instant. Juste un peu… mais c’est déjà pas mal, compte tenu de mon état juste avant qu’Ezekiel n’arrive. J’étais bien partie pour profiter à 200% de cette soirée, et il est venu mettre son grain, monsieur Grincheux. J’pourrais lui en vouloir, c’est vrai. Même si Sam en avait valu le coup. Mais allez savoir pourquoi, je me contente de profiter de sa chaleur. De ça, et de la vision de sa cigarette en train de se consumer, ce qui est carrément hypnotisant. “Je ne l’avais pas pour cible. C’était plutôt l’inverse. Enfin, pas que j’étais contre, au début, mais je n’me voyais pas coucher avec lui...” C’est sans retenu, sans gêne, sans tabou. C’est moi, quoi. Avec l’alcool par-dessus, pour bien édulcorer.

Ezekiel ne rebondit pas sur sa jalousie, ou pas suffisamment à mon goût, mais cela ne sert qu’à confirmer qu’il l’est à mes yeux. Sont tous pareils, ces hommes. Dès que leur ego en prend un coup, ils préfèrent contre-attaquer en parlant d’autre chose qu’en affrontant le vrai problème. Parce que oui, la jalousie parait que c’est un problème. Surtout quand on est coloc et qu’on a signé un règlement interdisant toute relation déplacée entre nous. Ah, ça… Je devais être bien trop sobre ce jour-là ! “Quel massacre ?” Je me redresse, le regarde un peu éberluée. “On s’amuse bien et si tu veux mon avis… t’en aurais bien besoin toi aussi” J’ajoute, l’air un peu charmeuse, probablement pour le convaincre de lâcher sa casquette sanctionnaire. De nouveau j’entends la musique et décide de la laisser s’écouler dans mes veines en dansant sensuellement, toujours assise sur le rebord de la baignoire. Un numéro tout en délicatesse pour capter le regard du beau brun et le persuader que ce dont il a besoin, c’est de laisser aller. Du bout des doigts, j’attrape le bâton incandescent et l’amène à mes lèvres pour tirer dessus. Tentative peu fructueuse, n’étant pas une fumeuse et n’aimant décidément pas le  goût de la chose. “D’ailleurs, si tu veux vraiment te détendre, je peux te présenter à un gars qui a mieux que ça sur lui” Intéressant, non ?

Ou juste suffisant pour me faire punir et m’enfermer dans ma chambre pour avoir amené plus que quelques personnes fêtardes chez lui...