Sa vie actuelle lui convient tout à fait. Certains pourraient la trouver trop stressante, ou trop triste, selon le point de vue. Mais si lui se sent épanoui dans cette trentaine bien entamée, alors les avis extérieurs n’ont aucune espèce d’importance. Il n’y prête en tout cas aucune importance. Hier, aujourd’hui et demain, ce sera toujours lui et le monde autour de lui, non l’inverse. Dans ce monde qui gravite autour de lui, Eva se révèle être un électron fort attirant que l’inattendu rend encore plus séduisant. Réapparait-elle dans sa vie au bon moment ? C’est difficile de juger, mais qui pourrait prétendre le contraire ? C’est indéniable, qu’il pourrait y avoir bien pire moment, pour surgir dans la vie du photographe.

C’est délibérément qu’il laisse ses doigts effleurer la peau de la jeune femme, c’est tout aussi délibérément qu’elle se précipite vers lui, sur son torse, contre ses lèvres. Elle s’en empare et il y répond avec une ferveur sans équivoque, sa main glissant dans le dos d’Eva, jusqu’à sa nuque qu’il agrippe assurément. Il retrouve un goût d’antan, un parfum qu’il se souvient avoir apprécié et qu’il adore, ce soir. Son côté sauvage en ressort aussitôt, sans vraiment qu’il ne cherche à le contrôler, car Aaron n’a jamais vraiment été un homme du genre à contrôler ses envies. Surtout pas celles-ci. Celles que son corps s’approprient au quart de tour, sans s’imaginer pouvoir faire machine arrière. Eva, délicieuse saveur de l’Italie, si différente de celle de Shaé et pourtant si confortable, elle aussi… On pourrait croire qu’il se perd, entre ces deux odeurs, mais Aaron serait un homme bien trop endommagé pour se laisser illusionner de la sorte. Certaines choses ne trompent pas. Les yeux si clairs et étincelants d’Eva ne le trompent pas.

Tout contre lui, elle murmure son prénom, utilise un temps du passé qu’il ne souhaite pas mettre en avant ce soir, car à quoi bon ? Imposante et virile, sa main vient éloigner quelques mèches de cheveux du visage d’Eva dont les expressions trahissent le désir de ses entrailles. Aaron l’observe un instant, de ses prunelles à ses lèvres qu’il se met en quête de reconquérir, encore, et encore, avant de lui murmurer, tout bas :

“Si cela avait duré, peut-être que tu n’aurais pas connu ça, ce soir.”

Ça, ce qu’il s’apprête à faire, un peu effrontément, pendant que les clients s’abreuvent tout autour d’eux, sans se soucier de ce qui se passe à leur table en fond de salle. Sournoisement, il glisse son autre main sur la cuisse de la jolie blonde. Lentement, mais sûrement, ses doigts tracent leur chemin sous la courte robe, sur cette peau plus douce qu’il n’aurait pu l’imaginer. Et il la déshabille du regard, sans néanmoins déloger une seule seconde ses yeux de ceux de sa proie. Il y a des dons qu’on se félicite encore plus d’avoir ; nul doute que l’un des dons les plus prédominants chez Aaron a toujours eu un rapport avec la gente féminine. Ce sourire qu’il esquisse, tout en partageant un énième baiser avec elle, quand ses doigts arrivent presque à leur objectif… Avec toute l’assurance qui est la sienne, le trentenaire cesse stratégiquement l’ascension de sa main mais ne parvient pas à se retenir de faufiler ses lèvres dans le cou de la jeune femme.

“Que veux-tu vraiment, alors ?”

Il veut la retrouver, mais pas comme la femme qu’elle était avant. Il veut découvrir ce qu’elle est devenue et ce, dans les règles de l’art qu’ils maîtrisent tous les deux si bien...