There's only minutes before I drop you off and all we seem to do it talk about sex. And she said use your hands and my spare time. We've got one thing in common it's this tongue of mine. And I'm not trying to stop you love but if we're gonna do anything we might as well just fuck. THE 1975 / S.E.X

Nuit trop courte, cernes trop longues. Tu bailles, la mâchoire outrancièrement ouverte. Les bonnes manières tu les as laissées chez toi. T’as laissé ta bonne humeur avec. T’as la gueule peinturlurée par un cosmos bleu et violet. Putain tu t’es pas loupé. Tu glisses tes doigts sur ta jugulaire endolorie en sortant de ton auditoire. Y a les regards de tes camardes, pétillants de curiosité. Sauf que toi t’as ton air trivial en mise en abîme. Le message est clair, t’as envie qu’on te foute la paix. Tu sens tes gencives encore compressées sous le choc de la veille.  Y a l’humiliation qui givre ton sang, tu te sens foutrement con d’avoir été défiguré par un pas de travers. Une mauvaise réception, la mâchoire implosée contre un rebord de fenêtre, le dos à terre. La tronche cassée, on dirait plutôt que t’as joué des poings sous les astres, que t’as fait ton caïd dans le royaume d’argent. Mais c’était qu’un putain de pot de fleur qui encombrait la brèche.

T’as mal dormi, t’as fermé les yeux pour voir des flots noirs, Il n’y avait pas de rêves, même pas de pensées courtoises. Juste la douleur immortelle et les ténèbres en compagnie. Les songes tu comptais les réserver pour ce cours à mourir d’ennuie. Mais tu n’as même pas pu te concentrer sur l’imaginaire, t’es encore amer de ton échec de la veille. C’est ton truc du moment, foirer tout ce que tu fais. Briser la crédibilité qui te fait défaut de toute façon. Tu t’enfonces dans ta médiocrité, tu te fonds avec le décor, t’es qu’un putain de con. T’es en équilibre, tes erreurs elles vont te conduire à ta perte. Comme tu n’as plus rien à perdre depuis qu’elle est partie, tu t’élances imprudemment dans le vide, le cœur en bombe. Tu comprends seulement maintenant que c’est toi qui risque d’exploser. Tu n’es pas une arme, t’es qu’une menace pour toi-même. Le canon sur ta tempe, c’est toi qui le braque. La grimace qui déforme ton visage, douleur, foutu martyr, foutue journée.

Le pire s’amorce, Nyla dans les couloirs, sa silhouette fantasmagorique et toute suite tes pupilles qui se rétractent. Nyla tu t’évertues à ne plus croiser son chemin depuis que t’es devenu une épave. Depuis que le souvenir d’une autre t’empêche de la voir telle qu’elle est.. Grenade humaine qui dégoupille tes entrailles. Nyla à une époque, elle n’avait même pas besoin d’ouvrir la bouche que tu perdes le contrôle. C’était instinctif, animal. Et maintenant, t’observes de loin la différence, la douleur dans les yeux, le corps en pause. Tu tournes le dos, tu te carapates avant qu’elle te voit. C'est pas le bon moment, c'est pas le bon jour, c'est pas la bonne vie.

Directement sortie de ton cours de danse, tu t’es douchée dans les douches de l’université, avant de récupérer ton sac pour aller à ton prochain cours. Pas de danse cette fois. Seulement une des matières de ton cursus mineur : astronomie. Dernière année que t’en fais. L’année prochaine, il n’y aura plus que la danse. Et tu trouves un peu ça dommage. Ca te change les idées, ça t’ouvre à d’autres choses. Ca te permet de garder la tête dans les étoiles un peu plus longtemps.

Tu t’apprêtes à prendre un couloir adjacent, mais pendant un bref instant, tu sens un regard sur toi. Assez insistant et inquisiteur pour que tu tournes la tête alors qu’il te tourne le dos. Tu pourrais reconnaitre sa silhouette n’importe où. Nev, t’en connais presque tout. Son allure, son attitude, sa démarche. Tu devinerais presque la tête qu’il fait, alors qu’il est dos à toi, prêt à disparaitre dans un autre couloir. Tu sais qu’il t’a vu, tu sais qu’il fui, et t’es partagée, tiraillé. T’as bien envie de le laisser se barrer encore une fois. Et pourtant, il y a ce quelque chose que t’as toujours eu du mal à identifier qui te pousse à aller vers lui, alors que t’as même encore clairement pris ta décision. Ton corps l’a fait pour toi, et t’accélères déjà le pas. Arrivée à sa hauteur, la main sur son épaule, tu le forces à te faire face. Seulement tu recules d’un pas lorsque tu vois son visage. Qu’est-ce que c’est que ce bordel ? qu’est ce qu’il a foutu ? Il est pas franchement du genre à se battre, ou à s’en prendre à qui que ce soit. Pourtant, impossible d’ignorer cette marque violacée sur son visage. « Tu vas m’éviter encore longtemps ? Parce que la dernière fois, t’avais l’air plutôt… satisfait de me trouver. » Illusion à peine voilée à votre dernier tête à tête d’il y a quelques semaines. Quand tu te perds dans son regard, t’y vois vos corps danser, se compléter. T’y vois ses gestes, instinctifs, primaires, ce désir de te posséder. T’y vois les réminiscences de votre dernière nuit. Et depuis, le silence le plus complet. Tu sais pas si t’as déjà réussi à le cerner complètement, Nev. Mais dernièrement, c’est pire que tout. Il a même pas l’air de savoir la confusion dont laquelle il te fout quand il revient pour disparaitre une fois. Parce que t’aimes pas ses silences radios, t’aimes pas ses absences. T’aimes pas non plus le manque d’attention. Son attention. Que tu le veuille ou non, tu t’y es faite. Alors quand il t’en prive, tu pars en vrille. Putain, t’as bien merdé, Nyla. Comme jamais. « Nev, il t’est arrivé quoi ? » demandes-tu réellement inquiète de l’état de son visage.

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Fuir c’est ton leitmotiv, le motif infernal qui donne un sens à tes actions. C’est la solution de facilité qui te sort des flammes. Ce n’est pas digne de ton sang, ce sang vermillon et incandescent. Symbole de force et de puissance. Les Di Pietro on pourrait les saigner juste pour la beauté de leurs veines. Alors que toi tu n’es que faiblesse et lâcheté. Toi t'as le sang bleu d'un corps dans le trépas.

Son contact, ses doigts, sa main. Tes épaules se braquent, t'es dans l'impasse de la confrontation, tu ne peux pas te barrer comme ça. Alors tu fais volte face, accueilli par les effluves de son parfum, le même qu’elle porte depuis des années. « Tu vas m’éviter encore longtemps ? Parce que la dernière fois, t’avais l’air plutôt… satisfait de me trouver. »  Elle embraye directement sur le sujet fâcheux, le sujet des tempêtes, de vos étreintes charnelles. Ce n’était pas le fruit du hasard si tu te tenais à l’écart de Nyla depuis quelques mois. Nyla et les lèvres couleur tentation, l’ivresse de son sourire, sans mentionner la frénésie de ses courbes. Nyla et les promesses de ses vertiges, promesses de te faire tomber encore. Pourtant Nyla tu l’aimais bien parce qu’elle faisait parler ton corps, elle n’avait pas besoin que tu sois loquasse pour te percer à jour. Elle se reposait dans tes silences, elle respectait tes économies en termes. Nyla elle t’a toujours pris comme t’étais, pas le plus beau, pas le plus fort, juste toi. Nev. La banalité suintant sur la peau, l’échec d’une famille de prestige. Sauf que ta belle là, en cet instant, elle n’a pas compris que t'avais pas envie de parler, malgré les signaux qu’envoi ton regard éteint. Y a que toi Nyla, pour faire exprès de pas comprendre. « Tu te fais des films, j’t’évite pas.» Mensonge sans ses détails. Tu n’as pas envie de prêcher le faux assidûment. Soit-elle te croit, soit-elle ne te croit pas, c’est plus ton problème, une fois que les mots ont pris leur envolée hors de ta bouche. « Nev, il t’est arrivé quoi ? » Inconsciemment tu touches l’objet du délit, haussant une épaule à la manière d’un insolent. « Rien d’grave. » Et cette fois tu dis vrai, ce que tu portes sur la peau ce n’est qu’une trace éphémère. Elle n’est rien comparée aux cicatrices nécrosées de ton cœur. Nyla, tu poses jamais les bonnes questions. Nyla face à toi, poupée désirable, poupée qui était tienne pour des moments interdits, hors du temps. « T'as pris la saucé ou quoi ? » Tu saisis une mèche de ses cheveux encore imbibés d'eau, geste involontaire, presque trop naturel.

Nev. Le crush d’une pré-ado, d’une ado, d’une jeune adulte. Nev, le mec que t’aurais pas dû toucher, le fruit défendu, auquel t’as cédé bien trop de fois, auquel tu t’es offerte bien trop de fois. Mais c’était simple. Des gestes naturels, instinctifs, des corps qui se comprennent. Nev, c’est un simple regard pour que tu fondes et que t’oublies de réfléchir. C’est un corps dont t’as eu du mal à te passer. Pourtant, t’as pas eu le choix. Rien, pas d’explication, juste un silence total, si ce n’est les quelques fois où tout le petit clan était réuni. C’est fini, tu viens le chercher, lui faire face. Ou plutôt qu’il vienne te faire face. « Tu te fais des films, j’t’évite pas.» Un sourcil arqué tu te demandes s’il se fout de ta gueule. Evidemment qu’il t’évite. Ou s’il a un autre mot pour décrire cette situation, t’es bien curieuse de l’entendre. « Prends-moi pour une abrutie en plus. Enfin comme tu veux. » T’aimerais comprendre. Pour une fois, t’as envie de l’emmerder et le pousser jusqu’à ce qu’il parle. Si jusque là tu te foutais qu’il ne soit pas très loquace, depuis quelques temps, c’est autre chose. T’as besoin de comprendre pourquoi tu ne l’as pas vu pendant des mois avant qu’il ne se pointe subitement pour reprendre là où vous vous étiez arrêtés. Une nuit hors du temps. Une nuit passionnée. Quelques heures où tu retrouvais ce corps qui t’avait manqué, ce corps que t’as adoré. Puis plus rien. Plus rien depuis quelques semaines. Pas un mot. Seulement un bref regard à l’autre bout du couloir suite à une rencontre fortuite. Alors qu’il vienne pas te balancer que c’est toi qui te fais des films. Tu l’observes, le scrutes, comme si ça allait te permettre d’obtenir des infos supplémentaires. Comme cette couleur violacée qu’il arbore sur son adorable visage. « Rien d’grave. » « Sérieusement ? » T’as envie de t’approcher, de le toucher, de regarder de plus près. Mais tu bouges pas. « Ca a mal tourné ? tu vas me donner des détails où faut que j’te tire les vers du nez pour… à peu près tout ? » demandes-tu quelque peu exaspérée. Tu restes figée quelques instants. Quand il a ses doigts autour de ta mèche. « T'as pris la saucé ou quoi ? » D’un geste vif, tu dégages sa main qui se trimballe sur une de tes mèches encore trempée. « Ca s’appelle prendre une douche. » Tu plantes ton regard azur au fond de ses iris, en essayant d’y déceler Dieu sait quoi. T’essaie peut-être bien de le décrypter. « Ces gestes-là, t’auras le droit quand j’aurais une explication. Quelque chose de satisfaisant. » Pourtant, ça te bouffe de lui dire ça. Parce que c’est trop naturel. Presque une habitude bien trop ancrée au fil des années. Ca te bouffe de lui dire de pas te toucher. A une époque, c’était bien plus simple. Juste un regard et ses mains se baladaient sur ton corps. Juste un regard et ses lèvres se retrouvaient sur ta peau. Pas d’autorisation, pas de rejet. Pas de flottement.

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Nyla, les pensées en prose, les pensées en overdose. Nyla addiction, lui mal sevré. Il est pris au dépourvu par les palpitations saccadées, par l’essence dans ses veines qui prend feu. Les pupilles en trompe l’œil, grandes ouvertes. Merde.  « Prends-moi pour une abrutie en plus. Enfin comme tu veux. » Il ne répond rien, il n’est même pas d’humeur à distribuer quelques traits d’ironie. Ceux qui auraient déclenché son indignation. Un de ces jeux qui leur était propre. Les jeux de deux amants qui aimaient se chercher pour mieux se trouver. Nev il a même pas essayé de formuler des fabulations. Nev ce n’est pas un menteur primaire, Nev c'est la vérité qu'il tait. « Ca a mal tourné ? tu vas me donner des détails où faut que j’te tire les vers du nez pour… à peu près tout ? » « Quand je dis rien de grave, c’est rien de grave. » Ordre à demi-mots, les lèvres tordues par l’agacement. Nyla il ne lui laisse pas le choix de son silence. Nyla elle s’inquiète toujours pour lui, et surtout pour rien. Jamais il n’a eu les mots pour la rassurer, c’est pas son fort au voleur, de faire mourir les inquiétudes.

Y a l'azure en peinture en face de lui qui le fait plonger. Il se liquéfie sous ses yeux, poupée curieuse, trop curieuse. Nev quand il a mis un terme à leur relation, il s’est tiré avec l’imagerie que contenait sa cervelle. La cervelle cramoisie, brûlée par des nuits le diable dans leurs corps. La vérité c’est qu’avec Nyla dans les parages Nev il est dysfonctionnel. Il a le corps machine, il a la volonté qui le fracasse, vent contraire dans les songes. Nyla c’est la faiblesse d’un mec qui supporte pas qu’on le touche. Nyla elle complète son algorithme. Nev il ne s’envoie jamais en l’air comme ça, par pure attraction physique. Nev c’est le mec qui a besoin d’une connexion électrique, de neurones alignés. Mais Nyla, avant même d’avoir appris à la connaitre, il récitait déjà ses courbes par cœur. Et ses empruntes, elles chauffent à ces souvenirs ardents. La vérité c’est que Nyla il l’évite parce qu’il sait qu’il est incapable de lui résister, à cette sublime tentation maladive. Et l’avoir devant lui, à portée de son touché, il a pas pu s’empêcher de saisir une mèche de ses cheveux, des gouttelettes tombant sur ses phalanges. Mais la main est propulsée, l'égo est égratigné. Il range la rejetée dans le fond de sa poche, brûlure imaginaire. C’est inhabituel et il a le ventre qui gronde, il y a des éclairs qui viennent poignarder la bouillie de ses viscères, le regard nuageux, intraduisible. Nev tu sais pas ce que tu veux. « Ces gestes-là, t’auras le droit quand j’aurais une explication. Quelque chose de satisfaisant. »  « C’est une forme de chantage ? » Et il manque de rajouter, parce qu’aux dernières nouvelles on n’était plus rien. Juste des cendres, des souvenirs encore un peu trop vifs, un assemblage d’erreurs.  « J’te toucherais plus. » Le mensonge qui sonne comme une promesse. La langue au combat, le vocabulaire armé pour repousser l’ennemie. Nev il a juste envie de sauter son dernier cours pour rentrer chez lui, foutre la journée en l’air pour la tranquillité de son coin de paradis où il laisse les mauvaises herbes pousser. « J’vais rentrer. J'ai une migraine. »  Et c'est à cause d'elle, celle qui met son corps à l'épreuve, qui dissocie sa tête et sa chaire. « See ya Nyla. » et le prénom qui roule hors de ses lèvres comme un adieu.

« Quand je dis rien de grave, c’est rien de grave. » Nyla, elle a un mouvement de recul, face à ce ton qui laisse peu de place à la discussion. Elle a pas l’habitude qu’on lui parle comme ça. elle a pas l’habitude des situations comme ça. Et elle a pas on plus l’habitude d’avoir Nev aussi loin, ou qu’il lui résiste plus de dix minutes. Nyla, elle préfère quand Nev la caresse, qu’il se mure dans le silence, c’est pas un problème quand il laisse ses lèvres s’exprimer sur son corps. Elle a pas besoin qu’il parle pour le comprendre. Il a juste à laisser le bout de ses doigts glisser sur sa peau.

Nev, il dit une chose, et ses yeux en disent une autre. Et Nyla, elle a pas d’autres choix que de faire avec, qu’essayer de lire entre les lignes. Mais elle y comprend rien. Absolument rien. Elle comprend pas plus que lorsqu’il a stoppé leur pseudo-relation, peu importe la définition qu’ils pouvaient en donner. Il t’a laissé avec des souvenirs plein la tête. Des souvenirs de brûlures laissées par le passage de ses phalanges. Des souvenirs de son propre corps qui frémit sous ses courbes masculines. Il l’a juste seule avec des envies dévorantes et des souvenirs brulants. Pourtant, même distant, mais avec son foutu silence radio, même quand il veut l’éviter, il est là, avec des gestes un peu trop naturels pour la toucher. Alors la main, Nyla, elle la dégage sans ménagement, malgré son cœur qui se serre un peu trop fort. Ca lui ressemble pas de rejeter Nev. Elle a toujours fait le contraire. Et pour ce geste, c’est des éclairs dans le regard du beau brun qu’elle se récole. Ses yeux se sont assombris, et elle se doute que ça lui convient pas. Parfait, parce qu’à elle non plus. « C’est une forme de chantage ? » « Vois ça comme tu veux. »  C’est peut-être le cas. Mais elle voit pas pourquoi lui il pourrait faire ce qu’il veut, se rapprocher l’air de rien, quand elle n’obtient qu’un silence de plus. « J’te toucherais plus. » Elle est exaspérée. Beaucoup trop. Il se rend pas compte, mais ça la blesse. Elle veut qu'il la touche, qu'il retrouve ce qu'ils avaient, ce qu'il a balayé d'un simple geste de main. C'est pas la réponse qu'elle attendait, et elle a juste envie de le frapper pour sa connerie. alors elle aussi, elle le fusille du regard. « J’vais rentrer. J'ai une migraine. » Une manière de lui faire comprendre que Nyla l’emmerde ? C’est comme ça qu’elle le prend, la princesse. Elle se fait peut-être des idées, mais elle est prête à parier que non. « See ya Nyla. » Ca y est, la princesse va exploser. Elle a pas l’habitude d’être foutue sur le côté. Pourtant, avec Nev, elle devrait l’être. Mais c’est plus fort qu’elle, et son sang ne fait qu’un tour. D’un pas rapide, elle vient le plaquer contre le mur du couloir, sans le moindre ménagement. « Tu fais chier, Nev ! Sérieusement chier ! » Ses mains restent sur ses épaules, comme si ça allait réellement l’empêcher de bouger. Elle y croit à cette illusion, Nyla, alors qu’il pourrait aisément inverser la situation et la bloquer contre ce foutu mur. Mais c’est peut-être le regard assassin qu’elle a qui l’en dissuade. Ou peut-être juste qu’il s’en fout. « C’est quoi ton problème ? » Elle se plonge dans ses yeux, comme elle l’a toujours fait. Nyla, elle a toujours réussi à le décrypter. Pas besoin de parler, pas besoin de mots. Juste à l’observer, se toucher, à se caresser, à savoir si c’était le bon moment ou non de lancer une conversation. Aujourd’hui, elle s’en fout, et elle comprend pas tout. « Tu me toucheras plus, hein ? Tes yeux disent autre chose, Nev ! » Elle veut lui demander ce qu’elle a fait pour qu’il soit comme ça. Pour revenir la voir une fois après des mois d’absence, puis plus rien de nouveau. Elle veut savoir pourquoi il semble vouloir autre chose mais fais le contraire. La seule chose qu’elle comprend, c’est qu’il préfère ne plus la toucher plutôt que s’expliquer.

All over, deep under my skin. You got me so emotional. We had something that never happened. If only we had less control. This secret is risky So we have to keep all these fantasies to ourselves. Charli XCX - Emotional

On les regarde et Nev déteste ça. Les yeux agglutinés sur eux, les pas qui ralentissent pour capturer une ébauche de dispute. Et Nev qui a peur de voir sa sœur au détour d’un des couloirs. Il a peur de ne pas avoir les mots pour lui expliquer comment il se retrouve plaqué contre un mur par ses erreurs. Epinglé vulgairement, rattrapé par ce qu’il fuit. Nev il a encore merdé bien malgré lui. Y a le bruit de son cœur qui explose près de la main de Nyla, y a les yeux éclairs qui font des siennes. Nev il ne bouge pas mais le tintamarre de ses pensées sont son fond sonore. La nuque tendue, la mâchoire cadenassée, les veines qui prennent de l’ampleur. Il n’a pas connu de rage similaire depuis des mois. Ces émois il les a esquivé, il s’en est protégé et il a surtout protéger les autres. Mais Nyla qui dégoupille sa volonté, qui le brûle, les paumes armées sur ses épaules. La bataille se joue dans leurs regards. Nev stoïque, Nev qui n’a pas envie d’être acteur d’un spectacle avilissant. Pas aujourd’hui Nyla, pas aujourd’hui. Et la princesse aux illusions qui pensent pouvoir le maintenir longtemps comme ça. « Tu fais chier, Nev ! Sérieusement chier ! » Nyla elle se blesse toute seule, Nyla elle avait le choix, elle aurait pu le laisser partir. Mais Nyla elle a choisi la proximité, elle a choisi de faire sauter les points de suture, de raviver les plaies même pas encore guéries. « C’est quoi ton problème ? » Nyla tu les vois pas les menaces éclatées au fond de ses prunelles, tu le vois pas le monstre que tu réveilles. Tu l’évoques par tes doigts, tu incante par tes foutues lèvres éternellement à son goût.  « Si j’te touche, pas toi non plus tu m’touches pas. » La froideur insolente qui accompagne son ordre. Pourtant il ne s’est toujours pas défait de son emprise. Nev ça lui fait mal de l’avoir aussi près de lui mais la douleur elle est plus puissante que lui. Nev il aime ça, souffrir pour ses jolis yeux. Nev il n’y peut rien si Nyla elle a toujours eu le contrôle de son corps. Nev c’est le prince déchu de son propre habitacle. Nev c’est les mots et le reste en dissonance. « Tu me toucheras plus, hein ? Tes yeux disent autre chose, Nev ! » « Mes yeux te disent d’aller t’faire voir, mais pas par moi. » Un geste en plus, un geste de trop, il la retourne pour que ce soit elle à présent qui devienne captive. Le mur et lui, prison de chaire, prison malsaine, prison souvenir. « Maintenant fous moi la paix avant qu’ma sœur débarque. Elle a cours aujourd'hui. » Les mains cramponnées sur elle, qui font pression au lieu de s’ôter. Nev il est même pas capable de réimposer la distance. Il tente vainement de se raisonner, captiver par un visage qu’il n’a jamais su oublier. « Nyla j’peux plus, j’peux pas. J’suis désolé. » Le murmure qui s'échappe de lui-même, la sincérité colorant ses mots. Je « peux » qui vient remplacer le je « veux. ». Nev il veut pas être de ces mecs qui blessent les autres impunément. Surtout pas les femmes, surtout pas elle.

L’attention, elle s’en fout Nyla, elle a toujours été un peu dans son monde. Assez pour ignorer les autres. De toute façon, en présence de l’italien, les autres sont rarement visibles. Trop fades, trop inintéressants. C’est pas quelque chose qu’elle contrôle, c’est juste comme ça. Même sans le voir, son corps le détecte, et l’appelle. Et si elle a la chance d’accrocher son regard, c’est foutu, elle regardera pas ailleurs. Et là, son attention, elle est bien que sur lui, un peu trop, et elle sait qu’il pourrait s’en passer. Elle sait qu’il pourrait se passer de ses reproches et de ses questions. Mais la princesse, elle pourrait bien se passer de son absence. « Si j’te touche, pas toi non plus tu m’touches pas. » « Bah et le chantage alors ?! » Une pointe de provocation dans la voix, Nyla est bien consciente qu’elle peut le pousser à bout. Mais si ça lui permet d’obtenir des réponses, elle fera avec. Parce que la vérité, c’est qu’elle déteste cette situation. Elle déteste que Nev soit aussi distant, sans savoir pourquoi. Elle veut juste le retrouver comme avant. En tout cas si c’est possible, et ça, elle en est certaine. Mais ça l’empêchera pas d’essayer. Parce que la princesse, elle est foutrement butée. « Et si j’ai encore envie de te toucher ? » Elle a envie de lui balancer qu’il est égoïste, mais d’une certaine manière, elle l’est tout autant. En attendant, il bouge pas, il reste là, à la regarder, à se perdre dans ses yeux clairs, son corps à quelques centimètres de celui de la princesse, ce corps qu’il a tant désiré, et qu’elle veut tout autant. Alors elle continue à le chercher un peu. Parce que ses yeux, ils mentent pas. Ils disent des choses bien différentes des mots qui sortent de sa bouche. « Mes yeux te disent d’aller t’faire voir, mais pas par moi. » Nyla, elle a pas le temps de dire quoique ce soit qu’elle se retrouve coincée, dos au mur, face à Nev. Dans d’autres circonstances, ça l’aurait amusé, et elle l’aurait certainement allumé. Puis il aurait craqué. En quelques secondes. Parce qu’elle a toujours su connecter leurs corps. Elle est douée avec le corps de Nev. Elle sait y faire, pour qu’il arrête de réfléchir et qu’il se laisse juste guider par ce qu’il ressent à l’intérieur. « Maintenant fous moi la paix avant qu’ma sœur débarque. Elle a cours aujourd'hui. » « Que j’te foute la paix ? C’mon Nev, tu me connais non ? » Il sait qu’elle lachera pas l’affaire. Il sait que plus il lui dira d’aller se faire voir plus elle lui tapera sur le système tant qu’elle n’aura pas une réponse satisfaisante. En attendant, il desserre pas ses mains. Elles sont toujours cramponnées sur ton corps. Alors pour quelqu’un qui veut avoir la paix, une fois encore, son corps le trahit, alors Nyla, elle est bien décidée à aller jusqu’à au bout, que Gemma débarque ou non. Alors ses mains, elles viennent se poser sur celles de Nev, dans un contact qui se veut apaisant, mais elle est bien consciente que ça peut faire l’effet inverse. « Nyla j’peux plus, j’peux pas. J’suis désolé. » Etrangement, son regard devient moins féroce, à Nyla, presque tendre, trop doux. Elle s’attend pas à ça. Elle s’attend au petit désolé qui s’échappe des  lèvres qu’elle veut retrouver. « C'est bien sympa de me dire que tu peux pas, mais tu veux quoi, Nev ? » Son emprise sur ses mains se fait plus forte, comme si elle avait besoin de s’y agripper, pour ne pas le perdre, pour se dire qu’il n’est pas encore complètement parti. « Pourquoi tu me dis autre chose alors que t’arrive pas à t’éloigner ? Arrête ça. » elle veut lui demander pourquoi il lutte autant, pourquoi c’est plus aussi simple que ça a pu l’être. Mais elle dit rien de plus, elle s’en tient à ça, en espérant que ça soit assez.

Les mots il ne les entends plus, les mots sont silencieux. De l’air qui batifole avec les lèvres de Nyla. Les lèvres obsessions et leurs caresses aériennes. Qu’est-ce que tu veux Nev ? Il se trouve là, le cœur du dilemme. Nev, tu sais pas ce que tu veux, Nev tu veux trop de choses à la fois, des choses inadéquates, qui ne se mélangent pas. Nev tu veux les grenades mais tu ne veux pas qu’elles explosent, Nev tu veux rentrer en guerre mais tu ne veux pas faire de dommages collatéraux. Nev tu rêves juste un peu trop de deux corps qui s’entrechoquent, qui se rencontrent dans la communion d’une nuit interdite. Nev tu veux plus te prendre la tête, tu n’as plus le cœur assez solide pour ça. Nev tu rêves de demain sous de meilleurs présages. Tu veux le ventre qui se tord de joie, et non parce qu’il se rend malade d’une femme qui ne reviendra pas. Nev tu as le gout des sourires sincères, remémorés dans la forteresse de ton palais. Mais Nev tu es à bout de souffle, tu n’arrives plus à sourire, t’es trop occupé à survire, à trouver de l’oxygène. Même Nyla elle n’a pas su rattraper tes rictus. Nyla elle aurait pu être la solution mais Nyla elle a plutôt l’allure d’un problème. Nyla elle commence doucement à revenir dans ton système nerveux. Tu as le sang qui bouillonne, t’as les reins qui se crispent douloureusement et délicieusement. La peau qui crépite à l’appelle de la sienne. Feux d’artifices artificielles en échos dans tes entrailles. Avoir envie d’elle, pour toi, ça a toujours été animalier et primaire. C’était irrépressible et contre nature de résister à ses avances. Et là, une fraction de seconde, ça se voit dans tes yeux. T’as ce regard venu du passé, celui que t’avais toujours avant de lui céder. Sauf que, au présent, c’est pas ce que tu veux. Alors tu as ce rire venu de nulle part comme dernier rempart, tu te fous d’elle pour pas qu’elle s’approche de trop près de la vérité. La tirade suivant spontanément :

« Nyla, t’as carrément une trilogie dans la tête. Ça se voit pas ce que j’veux ? Ce n’est pas assez limpide pour toi ? Renseigne-toi auprès de tes copines de ce que ça veut dire quand un mec fait tout pour t’éviter. J'vais te spoiler la réponse : c’est qu’il n’a pas envie d’te voir, et qu’il a surtout pas envie que tu lui cours après. Si j’voulais avoir de tes nouvelles, j’ai ton numéro. Si j’avais encore envie de te voir j’connais ton adresse. Il n’y a pas de vérité cachée, y a pas de double sens. Si j’fais rien, et si j’me tiens loin de toi, c’est parce que c’est ce que j’veux. »

Tu vends tes mensonges comme des élixirs de vérité alors que tu sers du poison. Tu ne contrôle pas la dose, empoisonnement volontaire. Tentative d’assassinat. Dernière parade avant de quitter la scène. Tu rends ton rôle, tu rends tes tripes, tu dégueules les frustrations trop longtemps retenues. La cage s’ouvre et tu libères les monstres. Un regard malveillant et tes mains se retirent enfin de Nyla. Tu la surplombes, jouant de ta grande taille pour accréditer tes propos. Et tes talons se tournent, le corps raidi par la colère expiée de ta bouche. Rideau final qui tombe, comme la sentence de vos destins à nouveau séparés. Tu t’éloignes, laissant tes mots la clouer sur place.

Tu vois Nyla, je t’avais dit que tu ne posais jamais les bonnes questions.

The end.