« Vite papa, vite, ça va bientôt commencer! » Debout sur le divan, je fixe la télé comme si ma vie en dépendait. Ce qui va jouer à la télévision dans quelques instants est ce que j'attends le plus dans l'année. Du haut de mes huit ans, c'est ma journée préférée de tout le temps. Dans à peine quelques secondes, le Super-Bowl commence.
« Allez papa, tu vas rater le début! » Passer du temps avec mon père est important pour moi. Je l'adore, il fait tout pour maman et moi, pour que nous soyons heureux. J'aime les espionner quand ils se donnent des bisous, ils croient que je dors dans mon lit, mais je les regarde à travers les rampes d'escalier, ils sont dans les bras de l'un et l'autre sur le divan. Ils n'ont même pas besoin de la télé pour rire. J'aimerais entendre ce qu'ils se disent parfois, mais si je m'avance trop je vais me faire repérer. La journée Super-Bowl, c'est la journée à papa et à moi. Le football est mon sport préférer et mon père dit que j'ai un bon lancé pour un enfant de huit ans.
« Je suis là Victor et avec le plus important quand on regarde le football. » Oui je sais de quoi il parle, je sens même l'odeur.
« DES AILES DE POULET! » Je saute sur le divan, tellement que je suis excité.
« Mon chéri on ne saute pas sur le divan, tu le sais pourtant. » Je saute une dernière fois et me laissant tomber sur les fesses, puis je m'agrippe avec mes deux petites mains sur le dossier du divan. Je lève ma tête pour que ma mère ne puisse voir que mes yeux.
« Désolé maman, je ne recommencerai plus. » Même si ma bouche est cachée par le divan, maman voit que je souris à pleine dent et m'envoie un bisou de loin. Je l'attrape avec ma main droite et le colle sur ma joue.
« Fiston, que la partie commence! » Le décompte est lancé, mon père, moi et les ailes de poulet, nous sommes prêts.
***
« Elle te dévore des yeux, allez mec va la voir. » Sam, toujours là pour m'aider. Il est mon meilleur ami, mais parfois je me demande s'il veut vraiment m'aider ou simplement il veut me voir me ridiculiser.
« Arrête Sam, c'est peut-être quelqu'un derrière moi qu'elle regarde. » Je n'ai pas de difficulté avec les filles, j'ai déjà eu des relations plus ou moins sérieuses, mais Melany est la fille que les gars veulent dans leur lit.
« Tu te moques de moi Vic, dans tous les cours elle te fait des signes, allume! » C'est vrai qu'en y repensant, il n'a pas tort. Toutes les fois où elle vient me voir pour me féliciter quand on vient de remporter une victoire, elle me touche souvent l'épaule en classe lorsqu'elle passe à côté de moi.
« T'es le capitaine de l'équipe de foot, tu es aimé de tous, les filles ne sont pas indifférentes à ton charme et ça d'ailleurs je ne comprends, car je suis plus beau que toi... » Après sa dernière réflexion, je le pousse pour me moquer de lui.
« T'es beau, mais ta une grande gueule, les filles aiment les mecs mystérieux. » Je ne peux retenir mon rire.
« C'est vrai que pour être mystérieux, tu l'es! Allez Vic, si tu ne vas pas la voir, je mets la photo du dernier party qu'on est allé sur Facebook! » Merde, je n'ai pas le choix, car s'il la met sur internet mes parents vont tomber dessus et je vais passer un mauvais quart d'heure.
« Bon d'accord j'y vais, mais s'il te plaît ne met jamais la photo en ligne, mon père me tuerait et m'empêcherait de continuer le foot s'il la voyait. » Sam me fait un signe de tête pour approuver ce que je dis et pendant ce temps je marche vers Melany.
C'est le bal des finissant, je devrais être heureux. Finir enfin le lycée. Franchir bientôt les portes de l'université. Pendant que mes amis font la fête à l'intérieur, je suis dehors. Ma tête est remplie de questions sur l'avenir, mais je n'ai aucune réponse et ça m'étouffe. Une bouffée d'air frais me fait sentir mieux et un long soupir sort de ma bouche.
« Que fait le roi de la fête dehors? » Je sursaute un peu, perdu dans mes pensées, je me retourne pour savoir qui se trouve derrière moi. C'est Sarah, une fille qui se trouvait dans presque toutes mes classes, mais que sans raison je ne lui ai jamais réellement parlé.
« Je ne suis pas le roi de la fête, je suis juste un gars... » Je n'ai pas le temps de finir ma phrase qu'elle me coupe la parole.
« Juste un gars qui est le capitaine de football de son lycée qui a remporté le championnat régional et qui sort avec la plus jolie fille de l'école selon un sondage qui est probablement erroné de la part des étudiants mâles en recherche de s.e.x.e. » Elle me regarde comme si j'allais exploser de colère après m'avoir un peu insulté et insulté ma copine. Cependant, ma première réaction fut un rire instantané.
« Tu sais, les gens normaux disent sexe et ne l'épellent pas. » Elle rit à son tour. À partir de ce moment, une discussion s'est installé entre nous pendant des bonnes trente minutes avant que Sam vienne me chercher pour me dire que Melany et moi, sommes rois et reine du bal. Avant de rentrer dans la salle j'adresse une dernière parole à Sarah
. « Tantôt, avant que tu me coupes la parole, j'allais dire que j'étais un gars qui a travaillé dur pour obtenir une place dans l'équipe et c'est avec les mêmes efforts que je suis devenu capitaine, je n'ai jamais voulu du reste, mais si je voulais garder le fruit de mes efforts, je me devais de devenir le gars que tous voulaient que je sois. » Je lui fis un signe de main et je rentrai pour aller récupérer mon prix. Sur scène mon regard ne décrocha pas de celui de Sarah. Ce jour-là, elle est devenue ma meilleure amie.
***
Je n'arrive plus a dormir. Je suis en sueur. J'ai encore fait le même cauchemar, celui où je retrouvais ma mère morte. C'est étrange de rêver ça, mais depuis le départ de ma mère, je ne fais que penser au pire. Qu'est-il arrivé pour qu'elle nous fuit, mon père et moi? Elle est partie sans me dire au revoir, sans prendre la peine de m'expliquer se qui se passe. C'est mon père qui m'a annoncé que ma mère avait fait ses baguages.
« Papa qu'est-ce qui se passe? » Le regard de mon père, je ne l'ai jamais vu aussi vide.
« T'as mère...hum... elle... » Non, qu'est-il arrivé à maman. Pour que mon père soit en piteux état et ne sache pas quoi dire, il lui est sûrement arrivé quelque chose de grave.
« Quoi papa!? Où est maman? » « Elle est partie, elle a quitté la maison. » Je ne le crois pas. Pourquoi ma mère aurait quitté la maison? Nous sommes une famille heureuse et unie. Oui il y a des mauvais moments, mais rien qui justifie qu'elle parte.
« Non je ne te crois pas! Pourquoi elle serait partie? Maman? » Je cri maman dans la maison, je fais le tour de toute les pièces, je regarde même dans le placard et je vois que ses choses ne sont plus là. Comment a-t-elle pu partir comme ça, sans se justifier auprès de sa propre famille.
***
«VICTOR! ARRÊTE TU VAS LE TUER! » Je ne l'écoute pas et je continue à frapper. Des gens essaient de nous séparer, mais ma colère me donne une force que je ne soupçonnais pas que j'avais en moi. Ça me défoulait de frapper, de plus ce type le mérite. Comment on ose toucher à une fille qui ne veut pas qu'on la touche? Personne ne peut toucher à Sarah, personne ne peut lui faire du mal. Sarah. J'entends encore ses cris me disant d'arrêter, cela me déconcentra et d'une traite on m'éloigna de l'autre gars. Sarah me rejoint à toute vitesse, elle a pleuré, ça se voit avec son mascara qui a coulé sur ses joues. Un homme vint dans notre direction.
« Sortez ou j'appelle le police ! » Sans broncher, Sarah me prend le bras et me tire à l'extérieur du bâtiment.
« T'es fou ou quoi!? Tu voulais le tuer? » Si je réponds oui à sa question, elle m'envoie directement dans un asile pour que je retrouve mes esprits.
« Non, mais il ne te lâchait pas. Si je n'étais pas intervenu, il aurait pu t'agresser! » Elle me regarde comme si j'étais un petit animal torturé. Dans un sens je le suis, depuis le départ de ma mère je cherche des réponses. Personne, même pas mon père ne peut répondre à mes questions. Ça me frustre de ne rien savoir, alors je me défoule.
« Victor, tu n'étais pas obligé d'y aller aussi fort, mais oui il l'a mérité. » Je peux toujours compter sur Sarah, elle me comprend mieux que personne. C'est avec elle que je passe le plus clair de mon temps, car à la maison c'est loin d'être la joie. Mon père et moi ce n'est plus comme avant, tout à changer.
« Allez vient, on rentre. On va mettre de la glace sur ton petit minois de chaton triste. » Elle arrive toujours à me faire sourire, malgré tout ce qui arrive.